La Cour de cassation réaffirme, dans un arrêt du 13 novembre 2025 (n° 24-14.322), que la vie privée du salarié demeure une limite infranchissable, aucune vérification du domicile ne pouvant conditionner l’accès au télétravail lorsqu’il est recommandé par le médecin du travail. Autrement dit, l’employeur doit rechercher des solutions alternatives, et ne peut opposer une telle visite comme préalable obligatoire.
Cet arrêt vient ainsi renforcer l’exigence d’effectivité des mesures d’aménagement du poste émises par le médecin du travail et non contestées dans le cadre du recours prévu à l’article L.4624-7 du Code du travail, tout en encadrant les marges de manœuvre de l’employeur dans la conciliation entre organisation interne et santé du salarié.
Dans cette affaire, le médecin du travail préconisait une limitation des déplacements d’une salariée, puis plusieurs jours de télétravail hebdomadaire. La salariée avait en ce sens rempli le dossier de candidature interne pour bénéficier du télétravail mais avait refusé la visite de son domicile, préalable nécessaire selon l’employeur, afin de s’assurer de la conformité du lieu à l’exercice du télétravail.
Son employeur, qui n’a pas contesté l’avis du médecin du travail selon la procédure prévue par la loi, avait estimé ne pas pouvoir répondre aux préconisations du médecin du travail, invoquant notamment le refus de la salariée de faire visiter son domicile pour vérifier sa conformité au télétravail. Il invoquait également le fait que « la salariée ne produisait aucun de ses arrêts de travail, ni aucun certificat médical, de sorte que la pathologie dont celle-ci était atteinte ne pouvait être identifiée et qu'il ne pouvait être distingué en quoi l'employeur manquait à son obligation d'assurer sa sécurité et protéger sa santé physique et mentale ».
Arguant notamment d’un manquement à l’obligation de sécurité de son employeur, la salariée avait saisi la juridiction prud’homale. La Cour d’appel avait donné raison à l’employeur.
La Cour de cassation casse l’arrêt.
Elle reproche à la Cour d’appel d’avoir statué en se fondant sur l’absence de justification médicale de la pathologie de la salariée pour écarter l’aménagement préconisé, motif impropre selon les Hauts Magistrats.
La Cour estime que la raison première du refus de l’employeur reposait sur l’opposition de la salariée à la visite de son domicile, alors même que les préconisations du médecin du travail s’imposent. Le non-respect de telles préconisations constitue, selon la Cour, un manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur.
Par conséquent, les juges considèrent que le principe de protection de la vie privée permet au salarié de refuser l’accès à son domicile et ne peut justifier le refus de recours au télétravail préconisé médicalement. En pareil cas, il reviendrait à l’employeur de contester l’avis médical selon la procédure idoine.